2/11/2007

La fausse piste du Québec

Bruno Marchand se lève contre la « tolérance » envers le geste suicidaire dans une « libre opinion » de Le devoir.com du 9 février 2007, à l’occasion de journées de prévention, lire.

Je suis tout à fait d’accord avec certaines idées avancées dans cette opinion signée par un collectif d’enseignants et de psychologues du Québec. Rares sont ceux qui échappent d’une façon ou d’une autre à cette question du suicide. Que ce soit pour eux-mêmes ou dans leur entourage proche ou éloigné. C’est donc l’affaire de chacun, nous avons le « devoir » d’y réfléchir. Et il est « impensable de laisser à elle-même avec ses idées suicidaires une personne qui souffre. Elle a besoin d’aide ». Oui ! Il s’agit d’ouvrir les yeux.

Un autre fait, « chaque personne qui se suicide entraine par sa mort, en moyenne, 20 personnes dans un deuil difficile ». Si le chiffre avancé est vrai, c’est probablement une réalité. Mais, ces personnes de l’entourage du suicidé n’y sont pas forcément impliquées au même titre. Personne ne sait à l’avance comment il réagira au décès d’un autre.

Le groupe de Marchand prend position sur un constat statistique, collectif et non pas individuel. Il y a aurait un lien entre le niveau « d’acceptabilité du suicide par la population et son taux de suicide ». C’est-à-dire que plus l’opinion accepterait le suicide, plus il y en aurait.

Un sondage pancanadien de la firme Léger Marketing a été commandé par l’Association Québécoise de prévention du suicide. Quoi ? Une firme de marketing ? Des gens payés pour une promotion commerciale ? Une entreprise financée par une association de « prévention » du suicide ?

Donc, cette étude montrerait que 42 % des Québécois considèrent le suicide comme un geste acceptable, et que ce taux serait plus élevé encore chez les diplômés. De cela, le groupe de Marchand compare la prévention du suicide à celle de la lutte contre l’alcool au volant. Le problème serait celui de la « tolérance » envers le suicide. Une tolérance qui par ce rapprochement avec la prévention de l’alcoolisme, résonne avec les autres thèmes d’études de Léger Marketing. Cette entreprise édite en effet un « baromètre de l’immoralité », une enquête sur la « tolérance » et une autre sur la « tolérance zéro pour la fraude et les délits économiques », voir. Ces enquêtes sont nettement orientées vers les questions du racisme, de la corruption et de la répression. Ce qu’ils entendent par « tolérance », est une notion à têtes multiples qui peut s’appliquer indifféremment, sans nuance, à des domaines étrangers les uns aux autres.

J’ai cherché un long moment sur le site de Léger Marketing pour retrouver l’enquête citée par l’équipe de Marchand. Le site de l’Association Québécoise de prévention du suicide, cette étude est introuvable. Par contre, il est fait mention de « marketing social ».

Pour l’instant, je n’ai pas retrouvé cette étude.

Et vous ?

Ce signifiant de « tolérance » est si fort que le groupe de Marchand l’applique à sa définition du suicide. Le suicidaire ne pourrait plus tolérer » sa souffrance. C’est une définition fausse sur le plan clinique. Il y a en effet des personnes qui se suicident pour rejoindre leur objet perdu, exemple, ou qui ne font que répondre à un ordre hallucinatoire.

D’où la possibilité d’un amalgame dangereux qui pourrait faire l’objet d’une consigne tout aussi dangereuse.

Si le suicide est une affaire de « tolérance » alors il faudrait prôner une politique de « tolérance zéro » ? C’est un archaïsme qui déboucherait très vite dans la condamnation morale dont le suicide a fait l’objet pendant des siècles !

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